L’EHPAD est mort, vive l’EHPAD

Afficher tout

Avec près de 40 000 décès sur un peu plus de 700 000 résidents, le COVID a particulièrement touché les EHPAD français. L’ampleur de la crise sanitaire n’a été qu’un révélateur des difficultés récurrentes de ces structures et de leur besoin profond de transformation.

Un plan d’investissement important

Le 12 juillet 2021, la ministre déléguée à l’autonomie Brigitte Bourguignon a présenté les priorités gouvernementales du Ségur de la santé et du plan de relance pour l’investissement dans les EHPADs.

Ces priorités se déclinent dans un plan d’investissement de plus de 2,2 milliards d’euros sur les volets immobiliers et numériques notamment.

 

A ce plan vient s’ajouter un partenariat entre la CNSA et la Caisse des Dépôts pour mobiliser plus de 3,5Mds d’euros pour le renouvellement du parc immobilier.

Un EHPAD de demain connecté et plus ouvert

Les aspirations à rester le plus longtemps possible au domicile et l’évolution des pathologies avec des niveaux de dépendance qui s’accroissent invitent à redéfinir le modèle de l’EHPAD. La ministre a résumé cette injonction en affirmant « l’EHPAD est mort, vive l’EHPAD ».

Les grandes lignes de l’EHPAD de demain sont données. Il sera :

 

  • Plus médicalisé (astreinte IDE la nuit, équipe mobile de gériatrie, de soins palliatifs, d’hygiène hospitalière)
  • Plus connecté (objets connectés, liens avec les familles, télémédecine)
  • Plus ouvert sur l’extérieur (EHPAD hors les murs, alternatives à l’hébergement permanent, partenariat avec la ville et les établissements de santé )
    Des établissements qui doivent s’y préparer

    Si la stratégie est claire, la mise en œuvre présente des défis non négligeables.

    Il est important de noter que 80% des EHPAD ont moins de 100 places. La très grande majorité du personnel y est donc concentrée sur des activités auprès des résidents et la capacité de l’équipe de direction à porter des projets de transformation est limitée.

    Le rôle des tutelles et des autorités de tarification s’en trouve renforcé avec non seulement un besoin d’accompagnement des structures sur le plan financier mais également sur le plan de l’expertise et de la conduite du changement.

    Un EHPAD plus médicalisé

    L’augmentation des effectifs médico-soignants dans les EHPADs est un vœux partagé par l’ensemble des professionnels du secteur sans que personne n’en voit encore les modalités ni la faisabilité économique.

    Même si des moyens supplémentaires sont nécessaires, ce n’est toutefois pas la seule condition de réussite d’une plus grande médicalisation :

    • Améliorer l’attractivité des conditions d’exercice pour les professionnels

    La rémunération reste bien entendu un facteur clé d’attractivité mais il n’est pas le seul. Les EHPADs doivent également être en mesure de proposer des conditions d’exercices susceptibles d’attirer des professionnels que ce soit sur l’organisation du travail en lui-même (horaires, roulement) mais également sur l’intérêt des missions exercées (diversité des tâches, autonomie et responsabilisation, conduite de projets) et les perspectives d’évolution (montée en compétence, travail d’équipe, réseau)

    • Utiliser au mieux les compétences de chacun

    La présence de personnel qualifié et notamment d’IDE auprès des résidents est un objectif pour l’ensemble des structures. Néanmoins, la médicalisation croissante n’est pas synonyme d’une augmentation homogène des besoins à tous les moments de la journée et sur toutes les professions. Des expertises ponctuelles des disciplines médicales et soignantes peuvent également être mobilisées pour améliorer la prise en charge (pharmacie clinique, diététique, ergothérapeute). Des modes d’exercice partagés ou des interventions ciblées peuvent venir en compléments des équipes socles.

    Un EHPAD plus connecté

    L’EHPAD connecté ne doit pas prendre exemple sur l’hôpital. Le dossier usager n’est pas un dossier patient et les besoins métiers sont complétement différents. Il serait une erreur majeure que de vouloir appliquer les usages du sanitaire dans les établissements médico-sociaux. L’EHPAD est avant tout un lieu de vie et les résidents ne sont pas des patients. Il existe ainsi des contraintes propres qu’il s’agit de prendre en compte.

    • Disposer de logiciels interopérables et capables de s’intégrer dans le parcours de soins

    Le virage de l’interopérabilité est essentiel pour les structures médico-sociales. Les logiciels n’ont de raison d’être que dans leur capacité à communiquer avec les établissements sanitaires et les professionnels de ville. Un EHPAD connecté ne saurait se contenter d’être un EHPAD où les soignants utilisent des tablettes et des ordinateurs. Il se doit d’être en mesure d’envoyer et de recevoir des données structurées concernant ses résidents.

    • Faire du numérique un véritable outil dans la prise en charge

    Au-delà d’un soutien aux professionnels de santé, le numérique doit également être intégré directement dans les soins portés aux résidents (travail cognitif ou physique) ou dans la relation avec les aidants. Cette spécificité ne doit pas être envisagée comme un complément par rapport aux fonctions classiques (gestion, prescription, dossier médical, plan de soins) mais bien comme un pilier des usages numériques.

    Un EHPAD plus ouvert

    La volonté d’ouvrir l’EHPAD à et sur son environnement revient régulièrement dans les discours depuis de nombreuses années. L’idée serait de sortir d’une logique d’hébergement pure pour passer sur un modèle de plateforme de services qui combinerait hébergement permanent et temporaire, accueil de jour, intervention à domicile et d’autres services encore qui restent à imaginer.

    Ce changement s’avère toutefois difficile lorsqu’une part significative du financement des structures est liée au nombre de journées d’hébergement permanent réalisées et que la file d’attente pour certains établissements ne cesse de s’allonger.

    L’ouverture de l’EHPAD peut néanmoins prendre des formes pragmatiques et en adéquation avec les attentes de chaque partie prenante.

    • Nouer les bons partenariats avec les établissements sanitaires et les professionnels libéraux du territoire

    Il existe parfois la tentation de faire des EHPAD une annexe gériatrique des établissements de santé qui serait uniquement la solution d’aval privilégiée des services de court et moyen séjour du territoire.

    A cette logique partenariale déséquilibrée, il faut préférer la création d’un véritable pôle d’expertise gérontologique, distinct de la dimension strictement médicale mais capable de prendre en charge la personne de manière globale et coordonnée.

    • Développer des passerelles avec le domicile

    L’hébergement temporaire, l’EHPAD hors les murs ou encore les dispositifs de répit pour les aidants sont autant d’initiatives qui permettent d’ouvrir les établissements mais qui demandent une taille critique pour pouvoir les porter. La logique partenariale avec les établissements de santé et les acteurs associatifs, publics et privés, n’en est que plus importante.

    Source :

    https://solidarites-sante.gouv.fr/actualites/presse/communiques-de-presse/article/dessine-moi-l-ehpad-de-demain-un-plan-d-investissement-massif

    https://www.cnsa.fr/documentation/cnsa_portrait_ehpad_2017_vf.pdf